Tout d’abord, je tiens à vous remercier de l’accueil que vous aviez réservé à cette nouvelle chronique à l'époque et plus encore pour la patience dont vous avez su faire preuve avant que je ne puisse libérer le temps nécessaire à rédiger un nouvel article. Vos retours et questions m’ont fait extrêmement plaisir et c’est avec une vraie motivation que je vais m’atteler à rendre la publication de « Suck my Deck » plus fréquente. Bon, plus fréquente en temps Daddy, ça donne tous les trois mois au moins, mais ça sera toujours ça de pris.
Allez, ceci étant dit, au boulot !
A l’issue de la nouvelle édition de la finale CdF, il m’apparaissait impératif de boucler le travail entrepris autour des decks qui m’avaient fait forte impression en 2011 pour éventuellement reproduire l’exercice avec 2012 (bien que de l’avis général, à l’exception de la surprise Nivmagus TT, cette édition a paru maigre en réelles innovations).
Dans le précédent article, nous avions ainsi abordé la notion de « Rogue deck » et focalisé notre attention sur Nic Fit, la première des curiosités ayant fait parler d’elle sur Vitry.
Pourtant, à bien y regarder, un autre deck pouvait tout aussi légitimement prétendre à une place de choix dans SMD, tant en illustration du concept « Rogue » qu’en vertu de sa performance.
En effet, à l’issue des rondes de la finale de la CdF 2011, un build fort singulier trônait en tête du classement, devançant des decks bien connus (Junk, CB Top, etc.) et largement éprouvés.
S’il fallait démontrer que ni le pilote ni son deck n’étaient tombé là par hasard, on notera que depuis, la même paire s'est tapée l’incruste dans le top 64 du BOM.
Et si une performance isolée peut prêter le flanc à un scepticisme fort naturel, les réitérations de succès tendent à valider tant la puissance du deck que la maîtrise du pilotage.
Cerise sur le gateau, le deck ne me semble pas le moins du monde dépassé et peut très bien se comporter dans le méta actuel, bien qu'ayant assez peu évolué.
Intrigués ?
Sans plus de cérémonie, voici le suspect du jour : GWr Berserk Stompy
Pour commencer par le commencement, voici la liste qui avait été jouée lors de la finale CdF 2011. De l’aveu de son pilote, la liste n’a que très peu évoluée depuis, faute de cartes rentrant parfaitement dans l’édifice.
Joli, hein ?
Une constatation s’impose d’emblée : Si Nic Fit faisait la part belle aux assemblages subtils de synergies cumulatives au service d’un plan mid-game adaptable, on fait face à une optique différente à bien des égards.
Berserk Stompy travaille lui aussi sur la synergie entre ses différentes composantes, preuve d’un build réfléchi. Pour autant, ici, point de plan de jeu souple ou de gain progressif d’avantage.
Non, là, tout de suite, c’est juste mes créatures qui veulent causer en privé avec ton nez, la discussion risquant d’être aussi tendue que les arguments cassants.
Le deck se veut très clean, épuré. Pas de place de perdue pour autre chose que l’objectif qui doit se dérouler en deux phases :
Phase 1 : Déployer rapidement des créatures sélectionnées pour leurs aptitudes au combat et leurs proportions généreuses.
Phase 2 : Envoyer gentiment le troupeau à la friture avec quelques tricks pour écourter le débat et pouvoir aller cloper tranquille entre les rondes.
Le plan de jeu de ce deck est odieusement simple mais on aurait tord de confondre simple et simpliste.
Si on se penche sur la liste dans le détail on peut constater l’élégance et le pragmatisme des choix opérés.
On est immédiatement tenté de comparer la liste à son cousin immédiat UG Infect Stompy (nous reviendrons plus loin sur la démarcation claire entre les deux approches).
Si les listes à base de bleu tablent sur la puissance des cantrips pour constituer des mains létales au plus vite, ici les ratios affichés entre les différents constituants sont limpides du fait de l’absence presque totale de fixeurs de draw (à l’exception notable de GSZ, bien en vue comme à son habitude) :
26 « créatures » dont 8 accélérateurs à mana, 14 Beaters et 4 Green Sun’s Zenith permettant densifier l’accès auxdits beaters.
21 Sorts dont 11 pumps et 4 anticréatures
17 terrains dont 8 Fetchlands
Tout est mis en œuvre pour s’assurer des mains d’ouvertures contenant une proportion équilibrée entre mana et accélérateurs, agression rapide et sorts de support pour dégager la voie et gonfler les troupes.
Le deck opérant à bas coût, les accélérateurs offrent la possibilité de réduire le compte de lands sans trop de peine, augmentant de fait les probas de toucher des cartes plus utiles que de simples lands si l’adversaire arrive à stabiliser avant que le taff ne soit fait. Disons juste que la stabilisation de l’adversaire se faisant fréquemment aux alentours des 5 points de vie, un 2/2 pour 3 ou un 0/1 Exalt pour 1 pourront causer quelques tracas bien inhabituels pour des poids plumes de leur trempe.
Et certains lecteurs de faire le parallèle avec les mythiques fins de parties de Sneak Show à coup de boule de Simian Spirit Guide.
Allez, prêts à mettre les mains sous le capot, dans le cambouis qui tâche ?
« Ach, Hans Cours ! C’est… un Kavru prédateur ??? »
Bon, tout d’abord pour lancer la ligne de front, difficile de parler d’agression sauvage sur fond vert non tribal sans incorporer le gentil Tarmogoyf. Réputé, éprouvé, 3/4 au minimum et souvent plus, sans effort de build particulier pour 2 misérables mana et plusieurs dizaines d’euros. Un bastonneur de choix. Check, you’re In !
A ses cotés, Wild Nacatl profite de la manabase Naya pour taper fort et vite. A ce niveau de la curve, ni Delver of Secrets ou Nimble Mongoose ne passerait le cut, le premier trop random, le second protection contre les boosts et lent à seuiller.
Zoo s’en était déjà fait un fer de lance par le passé, pas de réelle surprise à le revoir occuper son petit boulot de 3/3 préposé aux tacles dans les genoux.
La réelle surprise est à rechercher du coté de Kavu Predator.
Surprise tout d’abord parce qu’il s’agit d’une carte bien peu répandue en comparaison avec son homologue Lhurghoyf. A ma connaissance, seuls quelques jeux Aggro Loam basés sur Punishing Fire et Swords to Plowshares s’étaient aventurés à lui donner une place MD.
Surprise surtout parce qu’à l’emploi il se révèle ici bien plus dangereux que Tarmo. Le build a en effet été pensé pour optimiser au mieux le potentiel de la carte : Tant les moyens de gestion que les boosts, une large partie du jeu concourt à faire du Kavru une menace haut de gamme en un temps record.
Différence notable avec les jeux Aggro Loam cités plus, haut, 4 Invigorate à ses cotés décourageront l’adversaire de tenter un burn sur le petit 2/2 de peur de le voir subitement devenir en réponse 9/9 (ponctuellement et 5/5 de façon permanente), sans devoir engager le moindre mana.
Pour un jeu dont le but est d’épauler son agression par des boosts bien sentis, disposer d’une créature dotée nativement du piétinement, c’est une bonne chance de passer ses baffes au travers de la majeure partie des défenses que l’on vous opposera, des plus pénibles (Lingering Souls, Mother of Runes) aux plus épaisses (Tarmogoyf, Knight of the Reliquary).
En vérité, si on peut le gonfler en 5/5, le Kavru domine une large partie des situations offensives dans le format : Sa taille peut imposer, sa pseudo-évasion peut hacher menu.
Au passage, quelques représentants classiques du Long Range contrôle prennent de sacrées avoinées : En effet, Stoneblade et Esperblade qui apprécient peu de voir ce mastodonte toiser leur rempart de prédilection, Batterskull, rendu contreproductif.
Le patron, c’est LUI !
Et qui avons-nous pour tenir à la glue cette ligne de front ?
Réponse tout trouvée : La synergie évidente entre les accélérateurs de mana et Green Sun’s Zenith !
Noble Hierarch, tout d’abord, accélère la production des beaters et des boosts, tout en octroyant un petit bonus loin d’être anodin quand vient l’heure de compter le gain de taille sous Berserk dans un deck par ailleurs taggé « piétinement » en long, en large, en travers.
Elle fixe aussi les besoins éventuels en blanc, repasse vos chemises et peu même attaquer au cure-dent si votre adversaire est à l’article de la mort.
Elvish Spirit Guide se joint à la fête pour un peu boost supplémentaire et un body plus crédible que la noble.
Certes, sa contribution est plus limitée et se fait au pris d’un désavantage en carte indéniable mais, comme vous commencez à le lire entre les lignes, l’accélération revêt un caractère primordial pour cette liste qui ne compte pas trop voir ce qu’il y a après le tour 4.
A défaut là encore, si on se fait engluer en late game, une 2/2 peut donner un second souffle aux pumps et se révéler dangereuse si on a déjà bien cogné sur son adversaire auparavant.
2 Skyshroud Cutter ferment la marche des créatures à proprement parler : La bête surprend mais combote très efficacement avec Kavru tout en octroyant « gratuitement » un body en cas de sac effect en face (Liliana of the Veil, Diabolic Edict et Innoncent Blood pour en citer qu’eux). Une bête pour « rien », ce n’est pas le Saint Graal, mais ce n’est pas tout à fait anodin non plus.
Le deck étant un peu (très) « Kavru-centré », le Zénith de Vertsoleil, épaulé par les différents accélérateurs, bonifie les chances d’aligner rapidement un ou plusieurs 2/2 pour un coût de mana raisonnable.
Et c’est sur cette densification qu’à mon avis GWr Berserk Stompy prend naturellement le pas sur UG Infect Stompy. Ce dernier bénéficie certes de Brainstorm et de bonnes synergies avec notamment Invigorate. Par contre, aucune de ses créatures ne tient la comparaison avec Kavru L’utilisation des manas sur les cantrips coté Infect se tient au coude à coude avec le mana supplémentaire demandé par GSZ pour porter à 8 exemplaires le nombre de Kavru.
« Lorsque je leur ai demandé s'ils voulaient faire au plus simple, je voulais dire, au plus simple pour moi. » - Chandra Nalaar, Planeswalker
Le deck se démarque de ses congénères agressifs non seulement par le choix de ses créatures mais aussi par les sorts chargés de les appuyer au combat.
En matière de decks portés sur la castagne et les battes à clous, il y a plusieurs écoles. Certains optent pour des blasts pour clore les débats. D’autres sur de la défausse ou des contresorts peu chers pour poursuivre l’offensive sans subir la riposte adverse.
Mais, ça c’est des approches de gagne petit ou de fiotte pleurnicharde. Un deck d’homme, un vrai, ça termine l’adversaire façon dispersion thermonucléaire, sans chercher à se planquer.
Ici la presque totalité des sorts a pour vocation de déglinguer le camp d’en face, bloqueurs ou pas. Peu ou pas de gestion, aucune disruption ni contremesure. Juste la crème du boost pour faire gonfler aux stéroïdes des bestioles déjà bien énervées de base.
Tout d’abord, la rolls des pump spells : Berserk.
Trop souvent négligé ou simplement ignoré, ce sort paraît tout cassé dans un paquet saturé en boosts et bêtes.
Dès lors qu’on dispose d’une bête cognant pour 4 ou plus, on rajoute pour un pauvre mana 4 points de plus. Quand la fonction de la carte est de mettre les points dans la tête adverse et pas autre chose, Berserk surclasse aisément Lightning Bolt dans une large majorité des situations rencontrées par le jeu.
Petite subtilité : Ne perdez pas de vue qu’il est tout à fait possible de cibler une créature adverse avec nos Berserk dans le but de s’en débarrasser en fin de tour. Pas toujours très raisonnable, ce play peut se justifier face à une rampe adverse qui s’amorce quand on a un tirage assez garni en bêtes rapides : Tu attaques avec ta Noble Hierarch ? En réponse à l’Exalt, Berserk sur Noble Hierarch
Bon, n'oubliez pas non plus que les tricks subtils c’est des trucs d’intellos : Un Berserk sur Kavru 6/6 Exalt et un steak tartare 300g pour la deux !
Un peu en retrait de Berserk, Invigorate et Vines n’en apportent pas moins chacune un angle complémentaire intéressant à la prise de poids de nos créatures.
La première se marie à merveille avec Kavru et ne coûte aucun mana additionnel (bien qu’on puisse être amené à payer le plein prix si ça rame un peu).
La seconde protège nos créatures d’un blast, anti-créature ou contremesure (Maze of Ith, ces lignes sont pour toi), tout en assurant un boost loin d’être anecdotique bien qu’un peu cher.
Bien sûr, c’est en conjonction les uns avec les autres que ces pump spells révèlent leur vraie puissance : Une sauce avec un chétif 3/3 (Au vu des standards du deck, 3/3 c’est presque le niveau protozoaire) peut terminer en carnage pour un nombre de manas très faible : pour 0, Invigorate. Tu Swords ? Vines of Vastwood Kické. Tiens, pendant que j’y suis, j’exile Spirit Guide et je Berserk une fois que la pile est vidée. Tu as donc gagné 3 PV et mon Nacatl est devenu 22/11. T’as fetché déjà. Moche, ça.
11 Pumps semble être un nombre correct : Ce ratio donne de bonnes probas (environ 60%) d’en avoir 2 dispos au tour 3 en limitant les risques d’en voir plus ce qui n’est pas toujours aussi cool que dans l’exemple ci-dessus.
Autre élément clef du dispositif, Swords to Plowshares gère les bloqueurs éventuels tout en boostant de façon obscène les Kavrus déployés.
La carte est surpuissante dans les decks qui n’accordent aucun intérêt au PV. Par contre pour GWr Stompy, elle pourra se comporter en plus comme un super pump ou, au contraire, vous retarder si vous peinez à aligner Kavru.
La puissance globale de la carte lui gagne 4 exemplaires sans trop de difficultés.
On en termine par la pour le décorticage du MD par les 2 Sylvan Library qui vont faire piocher rapidement les menaces, les pumps ou les cartes du side. Et emmerder Contrôle au passage qui ne pourra pas souffler après avoir lâché Terminus sur le champ de bataille.
Tiens pendant qu’on en est à évoquer le side, pourquoi ne pas aller regarder ce qui le compose ?
« Il y a ceux qui ont un pistolet chargé et ceux qui creusent .... Toi tu creuses." - Clint Eastwood
4 Nature's Claim
2 Seeds of Innocence
1 Qasali Pridemage
3 Pyroblast
2 Red Elemental Blast
3 Gaddock Teeg
(notez que dans sa dernière version Magic Syle s'est orienté vers +1 Seeds of Innocence -1 Qasali Pridemage)
A y regarder de plus près, on voit que le SB est sainement orienté selon deux axes : Primo, apporter des cartes de support pour les MU délicats (Combo et Contrôle lourd). Secundo, s'encapsuler dans les synergies déjà en oeuvre dans le MD (faire gagner des PV à l'adversaire si possible ou être un Hate Bear que cibleront allègrement les boosts pour la gagne).
Commençons par les cartes évidentes :
Contrôle lourd est problématique avec ses Terminus et Humilités ? ANT vous met sous risque de prendre la grosse Tendrils ou l'ETW qui tâchent ?
Qu'à celà ne tienne, Gaddock Teeg va s'attirer les grâces des removals adverses si le gars en face veut éventuellement pouvoir raser le board ou tuer au bout de son storm.
On notera qu'avec Vines of Vastwood en couverture, la tâche risque d'être plus compliquée qu'il ne le pense.
Bien sûr, chaque boost est éligible pour permettre au nain ratatiné de passer ponctuellement le mètre vingt inhérent à sa condition, ce qui fait qu'en jouant une carte problématique pour l'adversaire, on apporte aussi un poids, certes menu, mais concret dans la balance offensive.
Le mix REB/Pyroblast semble tout indiqué pour pourrir les deux MU précités : Ouste les cantrips de combo pour se faire une main de décollage. Ouste les contres sur nos plays clefs. Dans un format saturé de bleu, 5 contres/removals anti-bleu, c'est tout à fait légitime.
Ensuite, viennent les cartes de synergie :
Qu'il s'agisse de Claim ou de Seeds, on dispose d'un moyen peu cher de gérer les enchantements ou artéfacts adverses pénibles (Bridge, Deed, Batterskull, Jitte, SoFaF, Shackles, je continue ou bien ?). Le tout en optimisant à nouveau ce bon vieux Kavu.
L'avantage de ce sideboard est de ne pas déstabiliser le maillage du maindeck en y apportant des cartes radicales mais n'entrant pas dans le plan de jeu. Le deck est très rapide et c'est plutôt à l'adversaire de trouver des solutions pour freiner notre course, pas l'inverse. Dans l'esprit, pas de Surgical/Crypt/Relic contre les Graveyards, pas de removals de créatures additionnels.
Je pose les questions, et toi, tu essaies de répondre. Le pistolet chargé, il est à moi. La pelle, c'est pour toi.
Niveau MU, le deck se défend très bien pré et post board contre toutes les stratégies aggros traditionnelles. Combo est souvent pris de court par la vitesse d'exécution du pack. Les stratégies Mid Range (Junk, BUG Aggro) souffrent de même.
Les seules stratégies plus confortables contre la liste sont en définitive les packs combo complètement All In (Belcher) ou les contrôles lourds (UW miracle et Pernicious Jace avec la batterie de Sweepers en side) qui vont soit encore plus vite que nous, soit à l'inverse ne font rien hormis déboiter méticuleusement chaque play que nous amorçons.
J'en termine donc avec le survol du pack dont je vous invite à découvrir le primer sur le site et que je vous invite à tester pour le fun que procure son déroulé.
Le mot de la fin sera pour remercier Magic Style pour sa disponibilité, sa patience et ses réponses toujours très utiles dans la rédaction de ce papier.
Allez, je vous dis à très bientôt pour une prochaine chronique des Suck My Deck !